Les campus à l’heure du numérique

 

 

En imposant l’enseignement à distance ou en hybride ces 18 derniers mois, la crise sanitaire a bouleversé les méthodes pédagogiques dans l’enseignement supérieur. A l’heure où les cours en présentiel reprennent, la révolution numérique de l’apprentissage prend corps, ouvrant la voie à de belles perspectives, à condition de lever tous les freins à son développement. 

C’est un constat évident, la crise sanitaire a été un moteur puissant de la mutation du travail en entreprise, matérialisée par le recours massif au télétravail et l’accélération de la transformation numérique. Un phénomène qui a aussi touché l’enseignement supérieur. Car, à l’instar de toutes les organisations, le confinement et les règles sanitaires  ont amené les établissements supérieurs à adopter rapidement des méthodes d’enseignement à distance, recourant massivement aux outils numériques. Une adaptation qui s’est faite quasiment du jour au lendemain. « Une semaine avant le confinement, très exactement », sourit Philippe Viot, Directeur Innovation Pédagogique et Développement de l’ESTIA. « Nous avons anticipé quelques jours avant l’annonce du confinement en mars 2020. Nous étions tous équipés, enseignants et étudiants, avec la suite Office 365 mais nous utilisions peu Teams, plateforme de visioconférence. En quelques jours, nous avons formé tous les enseignants à cet usage et avons adapté les pratiques pédagogiques à ce nouveau format au fil de semaines. Par exemple en modifiant les heures de cours, qui sont beaucoup plus fatigantes pour les étudiants à distance, et en laissant les enseignants définir des activités variées. ». A l’université aussi, un plan de continuité pédagogique a rapidement été mis en place. A l’UPPA, cela s'est notamment traduit par l'installation d'une cinquantaine de bornes Wi-Fi, le passage à très haut débit entre les sites de l'université, la distribution de kits de connexions à distance, l’augmentation du parc d’ordinateurs mis à la disposition d’étudiants et le recours aux outils numériques, comme Teams pour assurer les cours à distance.

Une autre approche

Si la rentrée 2021-2022 a vu un retour quasi à la normale, les confinements successifs ont entraîné une accélération nette des moyens technologiques déployés dans l'enseignement supérieur. « A l’Université, avant le confinement, tous les cours étaient ouverts sur elearn, une plateforme de cours en ligne, mais peu d’enseignants l’utilisaient. Aujourd’hui, bien que nous soyons repassés en présentiel, tous les enseignants sont formés et l'utilisent. Les étudiants, pour la plupart heureux d’être revenus en présentiel, sont eux aussi en demande de compléments de cours, de sujets sur cette plateforme. Beaucoup d’enseignants ont franchi le pas d’utiliser des outils numériques, qui sont des ressources pédagogiques complémentaires. Par exemple, Wooclap, un outil qui permet de faire des QCM en ligne, continue d’être utilisé en présentiel pour dynamiser les cours et vérifier si les étudiants ont bien compris le sujet, sans entrer dans une logique évaluative. C’est une manière de renouveler sa pédagogie et de sortir du cadre du cours magistral classique. De ce point de vue, les outils numériques rapprochent plus qu’ils n’éloignent », explique Frédéric Tesson, qui était Vice-Président de l’UPPA en charge de la formation et de la vie universitaire pendant la précédente année universitaire. Un constat que partage Philippe Viot. « Depuis la crise du Covid-19, nous sommes passés de l’expérience au process. Nous avons aujourd’hui de nombreux outils numériques avec microsoft Office 365, Wooclap, Teams pour fonctionner de manière hybride, le système LMS (plateforme d’apprentissage en ligne) qui sont entièrement intégrés aux enseignements. Par exemple, nous utilisons Teams en hybride quand un étudiant est absent pour des raisons de santé, nous avons des tableaux numériques wideboard à la place du traditionnel tableau blanc qui conservent la trace de ce qui est écrit pour les étudiants… Ces outils permettent d’une certaine façon d’avoir un « enseignant augmenté », à l’image de l’ingénieur ou du technicien augmenté. Cela ne remplace pas l’enseignant mais augmente ses capacités et crée de l’interactivité. C’est aussi un atout pour les étudiants qui ont des ressources supplémentaires pour préparer un cours, le réviser, aller plus loin ».

Valoriser l’enseignement hybride

Si la transformation numérique a fait un bond considérable, un long chemin est encore à parcourir pour développer les enseignements à distance ou hybrides. « Il y a encore de nombreux freins à lever. L’enseignement hybride ou a distance relève d’une autre pédagogie. On ne peut pas faire un cours à distance comme on le fait en présentiel. Les modalités sont différentes et les enjeux nouveaux : comment protéger la propriété intellectuelle de celui auquel appartient l’œuvre produite ? Comment valoriser ce type d’enseignement alors que l’université prend en compte uniquement les heures en présentiel ? Il est indispensable de prendre en compte le temps de suivi numérique, la création des ressources numériques qui sont des outils puissants d’apprentissage », souligne Frédéric Tesson. C’est pour lever ces freins que l’UPPA participe au projet HY-PE13 (HYbrider et PArtager les enseignements), qui regroupe 13 universités françaises. « L’objectif est de produire et partager des ressources numériques et des tutoriels qui permettront aux enseignants de passer à cette logique de l’enseignement hybride ou à distance. C’est un challenge majeur d’accompagner les équipes dans cette transformation pédagogique ».   

De nouvelles perspectives

Désormais inscrits durablement dans le champ de l’enseignement supérieur, les outils numériques ouvrent aussi de nouvelles perspectives. « Aujourd’hui, on peut se permettre de continuer à dispenser certains cours à distance car c’est tout aussi pertinent qu’en présentiel. On peut faire l’analogie avec le monde du travail, où de plus en plus d’accords d’entreprises permettent un temps de télétravail aux salariés. De la même manière, il est important de laisser aux étudiants un temps de téléenseignement dans une proportion raisonnable. A l’avenir, le téléenseignement pourrait être envisagé à l’échelle d’un individu, par exemple pour des étudiants sportifs de haut niveau, des étudiants à besoins particuliers ou porteurs de handicap. Ce sont des spécificités à prendre en compte et il y a un travail à mener pour rendre l’enseignement plus inclusif encore », ajoute Philippe Viot. A l’UPPA, une université multi sites, le numérique ouvre aussi des perspectives intéressantes. « Notre vocation n’est pas de faire de l’enseignement diplômant à distance. Mais le numérique peut être intéressant pour des formations, comme des Diplômes Universitaires en formation continue ou des masters qui s’adressent à des étudiants étrangers. Nous avons d’ailleurs deux master entièrement numériques à l’IAE et en Droit. On peut aussi imaginer accueillir un étudiant en situation de handicap et qui veut suivre une spécialité à distance dans une université partenaire, ou encore dans le cadre de mobilités européennes. Nous avons récemment lancé le projet UNITA, une alliance de cinq universités européennes pour développer un campus interuniversitaire. Le numérique va être très pertinent pour préparer les mobilités physiques, imaginer des compléments de cursus suivi à distance… ». Ou encore pour mutualiser certains cours sur deux sites, comme le fait l’UPPA avec sa filière Staps historiquement implantée à Tarbes et désormais présente également sur la côte basque. Le numérique n’en finit pas d’ouvrir le champ des possibles.

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