De nouvelles solutions pour la construction durable

Sur le site d'Arkinova, des acteurs oeuvrent en faveur de la construction durable.©CPB/L.Tomassi
Avec l’entrée en vigueur de la RE2020, plus exigeante, la pression règlementaire s’accentue pour inciter les acteurs du secteur de la construction, fort émetteur de carbone, à mettre en oeuvre de nouvelles solutions.

Responsable de 23 % des émissions de gaz à effet de serre et de 44 % de la consommation d’énergie, le secteur du bâtiment est en première ligne des objectifs de neutralité carbone de la France en 2050. Car atteindre zéro émission nette en un peu plus de deux décennies ne se fera pas sans réinventer les pratiques et imaginer des solutions nouvelles, alors que le secteur figure parmi les plus carbonés au monde. C’est dans cet esprit qu’est entrée en vigueur, le 1er janvier 2022, la nouvelle réglementation RE2020.

Remplaçant la RT 2012, ce référentiel remplace la notion de « réglementation thermique » par celle de « réglementation environnementale ». Tout sauf une coquetterie lexicale. Car ce changement de terme signe une approche plus ambitieuse et exigeante pour la filière construction. La RE2020 inclue la nécessité, au-delà de performances énergétiques accrues, de diminuer significativement l’impact carbone des constructions neuvesen prenant en compte l’ensemble des émissions du bâtiment sur son cycle de vie, de la phase de construction à la fin de vie (matériaux de construction, équipements), en passant par la phase d’exploitation (chauffage, eau chaude sanitaire, climatisation, éclairage…). Ce « budget carbone » est déterminé notamment par deux indicateurs, l’indice Carbone Construction, qui mesure l’impact des émissions de CO2 émis par les composants du bâtiment sur 50 ans et l’Indice Carbone Energie qui calcule l’impact des émissions de gaz à effet de serre par rapport aux besoins énergétiques du bâtiment sur la même durée.

Généraliser la mise en œuvre des matériaux biosourcés

Cette exigence, couplée à celle d’apporter aux habitations un confort d’été (calculé par le nouvel indicateur Degré-Heure qui quantifie la durée et l’intensité de l’inconfort d’un logement au-delà de 26 degrés), doit amener les acteurs du bâtiment vers une révolution de leurs pratiques, en optimisant la conception et surtout en donnant toute leur place aux matériaux biosourcés. C’est l’un des objectifs de la nouvelle réglementation qui, à mesure que les seuils carbones se réduiront (en 2025, 2028 et 2031), rendra inéluctable l’usage majoritaire des matériaux de construction biosourcés et géosourcés tels que le bois, la paille, le chanvre, l’ouate de cellulose, les textiles recyclés, le liège, le lin, ou la terre crue crue. Reste que ces filières, prometteuses, en sont encore à leurs débuts. D’où l’émergence d’initiatives pour structurer et développer des filières locales d’approvisionnement. À l’image du travail mené par l’AUDAP pour identifier, cartographier les gisements régionaux dans le cadre de la « toile BTP », cette initiative visant à connecter les acteurs locaux du BTP autour des enjeux de décarbonation.  

Sur le territoire, la R&D portant sur les matériaux biosourcés n’est pas en reste, avec les travaux menés par l’unité Géomatériaux et structures du génie civil et la Chaire ConstrucTerr’ dont les travaux portent sur la conception et l’utilisation de matériaux à faible empreinte carbone pour une construction durable.

Tous deux font partie de l’écosystème Arkinova dédié à la construction durable, dont l’incubateur-pépinière accueille des jeunes pousses comme Arrosia et Traille, qui travaillent à développer un biocomposite associant les savoir-faire des deux start-ups, la 1e spécialisée dans conception de matériaux durables à base de résine de pin et la 2e dans la valorisation de la laine de brebis. 

Recyclage et réemploi

Le recyclage et le réemploi des matériaux sont tout aussi nécessaires pour ne pas dépasser les seuils carbones de la RE2020, surtout les futurs seuils à échéance 2025, 2028 et 2031. Des chantiers « tests » anticipent déjà l’enjeu. Comme Habitat Sud Atlantic, l’opérateur public de l’habitat rattaché à la Communauté Pays Basque qui, pour la résidence d’habitat inclusif « le Clos d’Ainara à Anglet », a collaboré avec Patxa’ma, spécialisée dans la déconstruction et le réemploi de matériaux, afin de valoriser les 14 tonnes de matériaux déposés sur le chantier.

Et si les maîtres d’ouvrage donnent le ton, des entreprises du BTP s’y mettent également, même les plus petites. C’est le cas de Cédric Joignaux, gérant d’une TPE de maçonnerie et enseignant au Lycée Cantau, qui a anticipé la loi AGEC favorisant le recyclage et l’emploi de matériaux biosourcés, en appliquant des procédés bas carbones : briques en carton et en terre crue ou fabrication de granulats recyclés à partir de déchets de chantier. « Je suis parti d’un principe simple : ne plus aller en déchetterie. Nous collaborons avec les ingénieurs de Cantau pour tester la résistance des matériaux issus du recyclage. Nous projetons, avec ce lycée d’utiliser du laitier, un résidu de haut fourneau, pour remplacer le ciment. Il s’agit de revenir à ce qui se faisait il y a un siècle sur le quartier des Forges à Tarnos ». Pour l’entrepreneur : « Passer au bas carbone est simple. Les axes d’effort sont connus : se former, mettre en place des habitudes comme le tri sélectif et le réemploi. Et les solutions que l’on met en œuvre ne sont pas plus chères ». Il espère trouver des solutions viables pour les entreprises artisanales, sans passer par les centrales d’achat et n’hésite pas à partager ses expérimentations. Suivi par le Conseil Régional pour sa démarche sur le recyclage et les circuits courts, il planche sur une imprimante 3D pour recycler le plastique des chantiers, seul résidu qu’il ne réutilise pas pour le moment. 

Crèche Mamurrak et Ostavals, des projets exemplaires

 La Communauté Pays Basque recourt également à ces matériaux biosourcés, par exemple dans des projets menés à Espelette et Ostabat-Asme. La crèche Mamurrak sera le 1er établissement Recevant du Public (ERP) paille du territoire. Ce matériau satisfait à la nouvelle règlementation environnementale. Non transformée, la botte de paille est l’isolant à la plus faible « énergie grise ». Ce matériau nécessite en outre un transport réduit, avec une provenance locale. Et il se composte en fin de vie. C’est un « puits de carbone » qui absorbe et stocke le CO2.  Une option d’isolation par ailleurs à l’étude dans d’autres projets. Cette opération de rénovation est lauréate de l‘Appel à Projets « Bâtiment du Futur » porté par la Région. Mur à inertie en briques de terre crue, brises soleil orientables, puit canadien, ballon thermodynamique…, réduiront les consommations énergétiques.

À Ostabat-Asme, le projet d’Ostavals, Centre de valorisation du paysage et du patrimoine jacquaire, agricole et gastronomique, recourt à des énergies et matériaux innovants : coupe de bois à Ostabat pour la fourniture de bois de charpente, récupération de pierres sur un chantier de démolition à Saint-Palais ; chaufferie bois en co-maîtrise d’ouvrage avec HSA ; centrale photovoltaïque en « autoconsommation collective étendue », alimentant en électricité renouvelable une dizaine de bâtiments publics dans un périmètre de 2 kilomètres autour d’Ostavals.

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